Aout 2024 : ce récit retrace quelques impressions de voyage et propose quelques conseils pour ceux qui souhaiteraient entreprendre un voyage dans les pays du nord ou ailleurs
La préparation
Les voyages en avion léger, on y prend goût. Le rythme, les étapes, les paysages survolés, sont décidés d’un commun accord. Aucun voyage en transport terrestre ne peut donner autant de sensations.
Ce voyage dans les pays du Nord, nous étions quelques-uns, pilotes brevetés aux Alcyons, à y avoir pensé au retour d’un précédent périple dans les pays du Sud ; projet reporté à cause de l’épidémie de COVID.
Nous nous sommes retrouvés trois pilotes intéressés et volontaires, début juin, avec l’idée de partir ensemble, pour voir les îles de la Frise et y atterrir.
La préparation est à partir de là un investissement nécessaire. Le temps passé avant le départ pour préparer est la condition d’un voyage réussi, pendant lequel on saura gérer les imprévus et on ne sera pas bloqué.
Quelques conseils :
- Bien être clairs entre pilotes sur les objectifs (pour nous les îles de la Frise, la ville de Lübeck, et le survol des fjords du sud de la Suède), les limites qu’on se fixe (nombre d’heures de vol, dates), les capacités à avoir (linguistiques, limites météo, survols maritimes, zones de montagne), les types d’hébergements visés (les réservations d’avance sont quasi-impossibles à cause des aléas du trajet, donc il faut être très souple)
- Réserver une machine qu’on connaît, avec l’avionique souhaitée, le potentiel nécessaire et l’équipement pour la parquer à l’extérieur, huile moteur et fusibles, scotch, ficelle… ça peut toujours servir, et calculer ensuite la capacité qui reste en poids de bagage personnel
- Etudier les réglementations des pays, les zones traversées et établir une route idéale avec des terrains accessibles, permettant le ravitaillement en carburant, les formalités douanières si besoin, la difficulté et le prix (attention aux PPR, aux NOTAM, ne pas hésiter à appeler, avant le départ et la veille ou le matin même pour sécuriser), des terrains de déroutement
- Prévoir des plans B pour tout ce qui précède
- Assurer la disponibilité permanente dans l’avion de cartes papier, tablettes-smartphones et batteries avec applis de navigation, papiers de toute sorte (documents avion, licences…), et en fonction du trajet gilets de sauvetage et matériel de survie
- Au quotidien au sol et en vol, bien se renseigner sur les zones à réglementation temporaire, les horaires d’ouverture des terrains et les modalités d’intégration, comme en France mais avec la possibilité de « misunderstanding » méfiance…
- Bien entendu FCL055 obligatoire, et c’est l’occasion de pratiquer avec parfois des accents déroutants, mais dans la très grande majorité des cas un anglais parfait pour nous français (notamment en Allemagne et au Danemark)
Nous avions 8 jours et comme objectif de survoler et nous poser dans de nombreuses îles de la Frise, des Pays-Bas jusqu’à l’Allemagne du Nord, de visiter la ville de Lübeck, et si nous pouvions voler autant que prévu, de faire le tour du Danemark et, à partir du Nord du Danemark, d’aller survoler les premiers fjords du sud de la Suède en se posant dans la banlieue de Göteborg.
Nous nous sommes rendu compte que nous allions voyager à 100% dans la zone Schengen, ce qui nous a permis de simplifier énormément les formalités du voyage (pas de formalité douanière, contrôles d’identité minimaux).
Nous choisissons de voyager systématiquement avec un plan de vol. Il sera en général nécessaire à cause des franchissements de frontières ou des survols maritimes, mais nous trouvons plus sécuritaire de faire connaître nos vols. En fait, nous apprendrons qu’au Danemark, un plan de vol est obligatoire dès qu’on veut traverser une zone D, mais que certains vols transfrontaliers avec l’Allemagne n’en nécessitent pas. Dans le doute…
Le voyage
Nous partons pendant les JO de Paris 2024. Le club a délocalisé une partie des avions à l’aérodrome de Châteaudun, et c’est là que nous nous retrouvons pour partir.
Après une utilisation intensive l’été, le JL qui était notre avion cible est trop juste en potentiel, et nous nous rabattons sur notre plan B : KG. Il a un peu moins de capacité d’emport, mais comme nous ne sommes que trois, ce n’est pas un problème. Avantage, il a une avionique avec un GPS Garmin récent et une prise pour charger les tablettes-smartphones.
Jour 1
Par beau temps, nous faisons trois étapes Chateaudun – Le Touquet – Midden Zeeland – Texel.
Au Touquet, on contrôle notre identité pour aller aux toilettes. Ce sera la seule fois du voyage où nous aurons besoin de nos papiers.
Midden-Zeeland est un terrain accueillant avec une piste en herbe, sur une presqu’île au Pays-Bas à la frontière belge.
Texel est une île touristique, prisée des bataves, où nous passons la nuit. Premier contact avec les dunes et plages de sable que nous trouverons sur la côte ouest dans toutes les îles que nous aborderons.
Jour 2
Après une première journée longue, nous prenons notre temps, pour une seconde journée consacrée aux îles de la Frise.
Au départ de Texel, nous survolons un chapelet d’îles jusqu’à Borkum, la première île allemande. Terrain accueillant en dur, avec une intense activité para ce jour-là. Borkum est une station balnéaire un peu désuète, où l’on se déplace en vélo. Il y a un local avec des vélos pour les pilotes, et une simple boîte pour laisser l’argent de la location. Nous nous baladons en vélo et déjeunons dans l’île, pour repartir en fin d’après-Midi vers Leer sur le continent, pour passer la nuit.
Leer est une petite ville maritime charmante, avec un terrain en dur un peu rustique mais encore accueillant. On peut néanmoins y apprécier l’aviation légère allemande : peu d’aéroclubs, mais des privés avec leurs propres avions, Cirrus et autres DA40 rutilants.
Le soir, nous comprenons les horaires allemands pour le dîner : 18h00 et pas en UTC. Le soir, comme chaque soir, préparation de l’étape du lendemain. Un front qui passe au nord nous dissuade de poursuivre comme prévu. Dans un premier temps, nous choisissons d’inverser le sens de notre la boucle autour du Danemark. Nous partirons d’abord à Lubeck avant de monter vers le nord.
Un petit mot sur les terrains non contrôlés : aux Pays-Bas, en Allemagne, au Danemark, en Suède, ce sont des « Radios ». Ils sont très serviables mais sont manifestement moins professionnalisés que nos AFIS français et annoncent surtout la piste en service et le vent au sol. Nous n’avons pas eu d’infos très pertinentes sur les trafics dans le circuit. Les échanges avec les autres avions n’étant pas forcément en anglais, méfiance…
Jour 3
La météo, avec des nuages épars assez bas, permet de passer. Nous survolons toutes les îles allemandes jusqu’à Wangerooge, avec sa piste en dur. Nous déjeunons pendant une averse et apprenons au moment de partir que le terrain étant sans Radio jusqu’à 15h: il est en fait interdit de décoller.
Départ donc après la sieste, en direction de Lubeck, après un stop sur le terrain en herbe de Saint Michaelisdonn.
Magnifique arrivée à Lübeck, aux clochers de brique majestueux. Atterrissage sur terrain qui est un aéroport international, avec 2 vols par jours certes, mais qui a tout d’un grand.
Jour 4
Jour off à Lübeck, ancienne capitale de la ligue Hanséatique au moyen âge.
Visite de la vielle ville à l’architecture caractéristique, du musée de la Hanse, et tour en bateau sur la rivière qui enceint la ville.
Le soir, nous reprenons notre parcours. Des orages menacent en France pour notre retour. Or certains d’entre nous ne peuvent pas retarder leur date de reprise. Nous décidons pour assurer le coup d’abréger notre voyage d’une journée, en de renoncer aux fjords de Suède et au nord du Danemark, nos objectifs principaux (îles de la Frise et Lubeck) étant atteints.
Jour 5
La météo redevient clémente. Nous allons atterrir en Suède à Landskrona, après un stop à Maribo au Danemark, puis le survol de l’immense pont qui relie Copenhague à Malmö.
Landskrona est un terrain accueillant (encore un) où l’aéroclub est dans une maison particulière. Comme au Danemark, on doit pouvoir passer la nuit en prévenant au préalable.
Pour ceux qui iraient dans cette région, nos interlocuteurs suédois nous indiquent qu’on peut demander au contrôle de Copenhague de traverser la ville à basse altitude au-dessus du canal par un itinéraire VFR.
Avant de partir, nous récupérons Marshmallow, la nouvelle mascotte du KG. Un « travelling Teddy Bear » d’écoliers suédois. Il faudra leur envoyer des photos de ses futurs voyages.
Dernière étape, Odense au Danemark, ville de naissance du conteur Hans Christian Handersen. Odense est la troisième ville du Danemark, avec un quartier dédié à l’écrivain remarquable avec ses petites maisons anciennes en briques colorées. Il y a un immense terrain en dur avec une infrastructure d’aéroport pour se poser. Peu d’avions, mais c’est la base d’essai des drones au Danemark.
Pour le lendemain, nous décidons de retourner à Borkum pour profiter davantage de cette île sans voiture, avant d’entamer la descente vers le sud
Jour 6
Nous faisons une première étape à Tönder au Danemark. Le responsable du terrain qui habite à proximité nous prête des vélos pour que nous visitions la ville avant de repartir. Nous ne regrettons pas cette balade dans une petite ville danoise typique, avec ses petites maisons en couleurs et ses rues bien entretenues.
Puis nous allons à Borkum via l’étape que nous connaissons déjà à Saint Michaelisdonn. Arrivée à Borkum, mauvaise surprise : c’est dimanche et le parking est rempli d’avions allemands en week-end et il ne nous reste que 3 vélos en mauvais état, à comparer à la trentaine que nous avions vu lors de notre précédent passage.
L’hôtel est un peu désuet mais à deux pas de la mer et avec une piscine. Et nous passons une excellente dernière soirée en bord de plage, après un bain dans la mer du Nord, assez chaude en ce mois d’août.
Jour 7
Le trajet de retour que nous avons prévu est assez long, et plus nous allons vers le sud, plus il fait chaud. En France, la température est caniculaire.
On commence par la traversée complète des Pays-Bas, de Borkum à Midden-Zeeland, en passant cette fois au-dessus de la petite mer intérieure qui s’appelle Markermeer. Il faut ensuite voler au ras des pâquerettes en dessous des zones de Dhiphol-Amsterdam et de Rotterdam, avec des obligations de transporteur et de monitoring de fréquences.
Au passage, un conseil pour ceux qui volent dans les pays du Nord. En France le contrôle nous autorise le passage au travers des zones D. La-bas on croise plutôt des zones C. En théorie elles sont perméables aux vols VFR, mais en pratique, on ne nous laisse pas rentrer. On comprend que l’habitude en VFR y est de voler bas et par dessous.
Le reste du voyage est une étape Midden-Zeeland – Amiens, puis Amiens – Châteaudun, puis Chateaudun – Toussus
En conclusion
Avec une bonne préparation, à ne pas négliger, le voyage à l’étranger est accessible aux pilotes privés.
Des habitudes et réglementations un peu différentes, les échanges radios en anglais (et ceux qu’on entend en langue locale) obligent à une grande vigilance. Mais le fait d’être plusieurs à être attentifs dans l’avion aide à gérer cette plus grande difficulté.
Et à la fin, il reste une nouvelle et enrichissante expérience de pilotage, des paysages parfois à couper le souffle, et des rencontres sympathiques, insolites, pleines d’échanges culturels.
Ce qui était prévu
Ce qui a été réellement fait
Théa, Christian et Philippe
Aout 2024